La méthode hégélienne, une forme participative d’objectivité

Hegel ne pense pas contre lui-même mais contre soi-même, il engage le lecteur. Cette forme de dialectique conjointe est assez étonnante et, il me semble, malgré tous les prétendus imitateurs de Hegel, inimitable, ou en tout cas inégalée. La contre-pensée (aufhebung) génère un “avec” qui fait du lecteur le support de la pensée au même titre que celui qui pense, de sorte que la pensée n’est pas soumise, comme c’est le cas en général, au lecteur, mais supportée par lui. Voyons cet extrait des Leçons sur la philosophie de la religion :

Par la pensée, je monte vers l’Absolu et me dresse au-dessus de toute finalité ; je suis conscience illimitée et en même temps conscience de soi finie, et cela en accord avec la totalité de ma constitution présente empirique. Les deux côtés se recherchent et se fuient en même temps. Je suis, et il y a en moi et pour moi, ce conflit mutuel et cette unité. Je suis le combat. Je ne suis pas l’un des combattants. Je suis au contraire les deux combattants et le combat lui-même.

Ici, le “Je” a une consistance double, qui engage le lecteur. Sans devenir ce “Je” le lecteur y participe, de sorte que la pensée produite participe du lecteur. Hegel ne s’efface pas, au contraire, il se dévoile et, ce faisant, rend soluble sa pensée dans la pensée du lecteur. Il en ressort que la phénoménologie est moins un subjectivisme, comme je l’ai cru longtemps, qu’une forme verticale et “participative“, dirait-on aujourd’hui, d’objectivité.

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