Tous les romans se déroulent dans le passé. En lisant un roman dont les verbes sont conjugués au présent ou au futur, j’ai quand même l’impression que les personnages sont venus, qu’ils sont allés. Par nature, le roman est imparfait, romantique.
Tous les poèmes ont lieu dans le présent. L’expérience poétique est synchrone. Lorsque Rimbaud écrit “J’ai vu des archipels sidéraux…”, il les voit, et les voyant il les fait apparaître. Le poète est présence. Le poème est parfait, mythique.
Une pièce de théâtre enfin est une prophétie. Je me dis en lisant Hamlet ou en l’entendant que cela finira par arriver, exactement de cette façon. Je me dis en lisant Tête d’Or que le règne de Simon Agnel viendra. Eschyle, Sophocle, Shakespeare, Racine, Claudel nous montrent l’avenir, et à quel point — par certains côtés qui sont l’essence même de leur art — il est réel et monstrueux : tragique.