Ce que Dieu a fait pour sauver les artistes

Dieu pense : “Il me faut un truc pour ramener les brebis égarées, celles qui au bord du chemin ont déniché des flaques de merde et s’y sont vautrées, puis elles ont continué dans la liberté, vers les cimes égouttées, vers les flammes molles. Puis elles ont commencé à se lécher les sabots, d’abord les leurs, puis les sabots des autres brebis égarées, et la langue, les paupières et tout le reste, qui pendait. Elles se sont roulées à l’intérieur de leur folie, à bêler comme des enclumes, à s’automutiler contre des arbres aux épines grosses et empoisonnées. Il me faut un truc pour celles-là, il me faut un symbole. Si je leur dis venez, elles ne viendront pas. Elles préfèrent la frénésie. Si je leur annonce ce qui est vrai, elles ne me croiront pas. Elles préfèrent gueuler des phrases qu’elles ont elles-mêmes inventées. Si je leur explique ce qui est juste, elles bêleront encore plus fort, elles se paieront ma tête, et elles se noieront dans des tonneaux de vin plutôt que d’y prêter l’oreille.”
Alors Dieu inventa la Beauté.

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Guillaume Sire
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