Le cœur se situe dans le médiastin, c’est-à-dire « au milieu ». C’est le point vers lequel l’Être converge, fragment d’une matière dont Hésiode prétend qu’elle contient l’ensemble des “Tout” et des “Rien”.
Le coeur a le pouvoir d’absorber, de digérer et de projeter. Il prouve la théorie du BigBang. Fétiche sanguinolent, violacé, oxygéné, bourré de larmes et de fissures, entrelacs de tissus rougeâtres et de fleurs liquides, serpent né du fond de la vie ; il n’a besoin d’aucun stimulus conscient pour fonctionner. Okay, mais pourquoi bat-il ?
Vraiment, pourquoi le cœur bat-il ?
Il manque un mode d’emploi.
C’est comme si un autre corps était perfusé au mien.
Le cœur fonctionne parce qu’il n’est pas à nous. Il me tuera lorsque j’aurai perdu trop de terrain pour qu’il ait envie d’en gagner.
Le cœur ne bat pas, il est animal : il se bat.
Je voudrais que mon coeur me quitte comme une jeune fille quitte son amant lorsqu’il est moins vigoureux. Qu’il s’en aille avec d’autres. Qu’il me trompe. Qu’il ouvre ses oreillettes à d’autres symphonies.
L’homme est un porte-cœur, mais du cœur n’est pas le propriétaire : il en a l’usufruit pour une durée déterminée.
(Simon Weil : “Dieu m’a donné l’être pour que je lui rende.”)
Le coeur, c’est le sexe de l’infini : partout où il pénètre, Dieu est allé aussi.
Un cœur peut-il battre privé de corps ? J’en suis convaincu — et mieux, plus fort.
Dans le noir de la tombe, un feu rougeoie encore.