Un jour nous apprendrons que les avions ne volent plus. Ils auront volé, ils ne voleront plus. Ce ne sera pas parce qu’il n’y aura plus d’énergie ou parce que le vent soufflera plus fort ou parce que les nuages seront épais. Les lois physiques n’auront même pas changé, ni celles des hommes, ni aucune fonction sociale, naturelle ou divine ; cependant les avions ne voleront plus, ni rien de ce que les hommes auront construit : il n’y aura plus de montgolfière, les satellites seront dispersés dans le vide interstellaire. Tout sera (r)entré dans l’ordre : voler sera (re)devenu un rêve pour enfants normaux et pour poètes moyens. L’histoire de l’aviation aura constitué un court épisode de l’histoire des Hommes, un rétrécissement touristique du monde, une injustice martiale, des ombres sur le sol, des traits blancs et progressifs sur le bleu du ciel, des bombes sur des peuples qui n’avaient pas l’eau courante. Les souvenirs ne tarderont pas à devenir des mythes : il y aura des sectes, ils y aura des fous, des sages, des danses autour de feux bizarres. Les aéroports seront détruits ou, pire, réhabilités. Les carcasses des avions pourriront au soleil — monstres inorganiques, anges obèses, ruines d’une civilisation qui aura voulu s’approcher du soleil en prétendant que Dieu n’existe pas.
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