Dans sa mâchoire carrée, sous les pépites laiteuses, s’ouvre une plaie sans lèvre, armée de dents infâmes, raccommodées au plomb et caramel, caramélisées, avec saccades luisantes quand la langue graisseuse vient d’y passer. Sur chaque expression du visage, à n’importe quelle heure, la bêtise règne sans partage dévorante et décorative, une bêtise de pâtre espagnol, qu’on sent lâche et calculatrice mais trop bête pour faire mal, illuminée d’anciens chagrins, peut-être les gifles d’un père cocu, les coups de griffes d’une dinde mère. Un hameçon dans le cœur a remplacé le sentiment des autres, accéléré le frétillement. L’ambition pêche au vif. Une brutalité de chien de chasse se superpose, quand on lui demande de faire quelque chose, à la connerie, qui est celle des gardiens de foire quand dans la nuit la Grande Roue éteinte fait à la lune, au-dessus des autos tampon, une couronne d’ombre.
Il a franchi le doctorat dans un déhanché de vieille pute positiviste. Il lui fallait en ce temps-là rouler des pelles avec les yeux, dans les couloirs, quand il croisait quelque maître de conférences plus important que lui. Du coup, il est à l’université, il y reste, poire de lavement installée dans le fromage. Il reluque les étudiantes avec sa gueule de marchand de poney, écuyer ivrogne, maquignon agressif, obsédé, rieur, suintant, un menton hargneux, un nez pâteux et dessus des petites touffes mi herbes des dunes mi poils de sangliers. C’est le problème avec les sciences sociales : les mandarins désignent des mongols. Aucune évaluation. Rien, personne ne vérifie. On se retrouve avec des crétins de haute volée, des ambitieux fainéants, qui pourrissent les diplômes, insultent le petit personnel, méprisent les étudiants. On les reconnaît aisément : ils font semblant d’être débordés, par des sujets très importants, de grands dossiers. Ils publient très peu et toujours dans la même revue.